Berlin, 11 février 2025 – Selon l’Indice de perception de la corruption (IPC) 2024, publié aujourd’hui par Transparency International, la corruption systémique en Afrique subsaharienne compromet gravement l’action climatique. Une fois de plus, c’est cette région qui obtient le score moyen le plus bas au monde, avec 33 sur 100, ce qui est bien inférieur à la moyenne mondiale de 43.

Les pays africains ont désespérément besoin de sommes importantes de financement climatique pour mettre en œuvre leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) – les plans d’action climatique soumis aux Nations unies (ONU). L’action climatique est fortement menacée par la corruption dans la région, notamment par le détournement, le vol et la mauvaise affectation des fonds. Cela souligne la nécessité de mettre en place des mécanismes solides pour faire en sorte que les fonds alloués aux projets climatiques profitent aux communautés qui en dépendent désespérément.

Les pays subissant les pires effets de la crise climatique, notamment la Guinée équatoriale (13), l’Erythrée (13), la Somalie (9) et le Soudan du Sud (8), sont aussi parmi les plus concernés par la corruption. En Somalie, le changement climatique fait des ravages dans l’économie agricole du pays et a aggravé le conflit qui y dure depuis 30 ans.

Paul Banoba, Conseiller régional pour l’Afrique subsaharienne de Transparency International, déclare :

« L’Afrique fait face à la plus grande vulnérabilité aux effets du changement climatique, puisqu’elle abrite neuf des dix pays les plus gravement touchés au monde. Les dommages causés par le changement climatique coûtent au continent entre 290 et 440 milliards de dollars par an. Il est essentiel que toutes les ressources mobilisées pour la réponse au changement climatique soient à l’abri de la corruption grâce à des systèmes anti-corruption robustes afin de protéger les vies et les moyens de subsistance de centaines de millions d’Africains directement touchés par les impacts sévères du changement climatique ».

L’AFRIQUE SUBSAHARIENNE EN BREF

L’IPC classe 180 pays et territoires en fonction de la perception du niveau de corruption au sein de leur secteur public sur une échelle de zéro (forte corruption) à 100 (aucune corruption).

  • Les Seychelles (72), le Cap-Vert (62), le Botswana (57) et le Rwanda (57) obtiennent les meilleurs scores de la région.
  • Certains pays se sont notablement améliorés : la Côte d’Ivoire (45) a gagné 10 points depuis 2019 ; les Seychelles (72) ont gagné 20 points depuis 2012, ce qui en fait le pays qui a le plus progressé au niveau mondial ; la Tanzanie (41) a gagné 10 points depuis 2014.
  • A contrario, les baisses les plus marquées s’observent au Lesotho (37), en recul de 12 points depuis 2014, et en Eswatini (27), en recul de 16 points depuis 2014. Enfin, le Gabon et le Liberia (tous deux 27) ont perdu 10 points depuis 2014.

CORRUPTION ET CHANGEMENT CLIMATIQUE

  • En Eswatini (27), les dépenses non autorisées dans le budget national réalisées par différents ministères, combinées à l’inaction de la Commission anticorruption, continuent de saper la lutte contre la corruption. Les températures y ayant augmenté de plus de trois degrés depuis 1950, les sécheresses y sont plus graves que par le passé, laissant 25 pour cent de la population avec un accès limité à la nourriture et à l’eau.
  • L’Afrique du Sud (41), premier pays à avoir signé un accord de partenariat pour une transition énergétique juste, accueillera cette année le Sommet des dirigeants du G20. Cependant, l’ex-PDG d’Eskom affirme qu’environ un milliard de rands (plus de 56 millions de dollars) est volé chaque mois à Eskom, le fournisseur d’énergie public, ce qui jette le doute sur la capacité du gouvernement à lutter contre la corruption liée au climat.

Malgré ces perspectives négatives, certains pays ont tout de même réalisé des progrès remarquables grâce à leurs investissements dans la lutte contre la corruption.

  • Les Seychelles (72) poursuivent des affaires de corruption très médiatisées et ont renforcé l’échange d’informations entre les institutions compétentes chargées de faire respecter la loi. Ces efforts ont valu au pays d’être retiré de la liste noire de l’UE des juridictions fiscales non coopératives. Les Seychelles ont été saluées pour leur approche innovante visant à réduire les émissions, notamment ses activités d’économie circulaire et sa participation citoyenne accrue.

Maíra Martini, Directrice générale de Transparency International, explique :

« Il est urgent et nécessaire d’agir à travers le monde pour éradiquer la corruption qui sape l’action climatique par le vol, le détournement de fonds et l’exercice d’une pression abusive. Les gouvernements et les organisations multilatérales doivent intégrer des mesures de lutte contre la corruption dans leurs efforts en faveur du climat afin de protéger les financements et de restaurer la confiance. Ce n’est qu’en nous attaquant de front à la corruption que nous pourrons débrider la puissance de l’action climatique et accélérer la lutte pour notre planète, notre avenir. »